A l'été 2019, alors qu'elle parcourait seule, en Turquie, le trek du Chemin des Soufis, Linda Bortoletto faillit mourir dans les montagnes d'Anatolie centrale, victime d'une agression sexuelle dont elle réchappa par miracle et qui la laissa dévastée. Quelques mois plus tard, elle décidait de se lancer dans un périple de résilience et de purification en affrontant l'un des treks les plus difficiles de la planète, le Greater Patagonian Trail, qui, depuis Santiago du Chili, traverse les Andes sur trois mille kilomètres non balisés, absolument sauvages, dangereux, où règnent les quatre éléments : volcans en activité, torrents déchaînés, apocalyptiques tempêtes, végétation parfois infranchissable. Ce défi la conduira au bout du monde, là où renouer avec la vie.
Un chemin de randonnée long de plus de mille kilomètres traverse Israël en serpentant, ondulant et se tortillant : le Shvil, ou Israel National Trail. Peu de gens le connaissent et encore moins savent qu'on l'appelle aussi "le chemin des anges". Linda Bortoletto l'a parcouru seule pendant deux mois. Depuis la frontière avec le Liban, au nord, jusqu'à la mer Rouge, au sud, elle qui n'est pas juive, qui n'était jamais venue en Israël, elle dont la mère est musulmane, va, pas après pas, rencontre après rencontre, appréhender Israël par la nature, l'intensité et l'énergie de cette terre, mais aussi chercher la vraie raison de sa présence là-bas, tenter de réconcilier en elle-même la guerrière, la femme et la mystique. Exploratrice, conférencière, écrivain, Linda Bortoletto a sillonné les régions les plus reculées de la Sibérie, de l'Alaska et de l'Himalaya, à pied ou à vélo, s'initiant au chamanisme et au bouddhisme. Avec cet Israël secret, intime, elle raconte sa découverte du Moyen-Orient.
Dans les derniers jours de la guerre civile espagnole, l'écrivain Rafael Sánchez Mazas, un des fondateurs de la Phalange, échappe au peloton d'exécution des troupes républicaines en déroute grâce à un soldat qui, bien que l'ayant vu, lui laisse la vie sauve. Soixante ans plus lard, un journaliste s'attache au destin des deux adversaires qui ont joué leur vie dans un seul regard et entreprend de recueillir des témoignages pour transformer cette histoire en fiction.
Roman-document qui a bouleversé l'Espagne et connu une carrière internationale, ce livre est porté par une réflexion profonde sur l'essence même de l'héroïsme et sur l'inéluctable devoir de réconciliation. II a été adapté au cinéma par David Trueba.
Traduit de l'espagnol par Elisabeth Beyer et Aleksandar Grujicic.
Faire le tour du monde.
Sans doute l'un des plus vieux rêves de l'homme. En 1968, le Sunday Times décide d'organiser la première régate en solitaire et sans escale, en doublant les trois caps : Bonne-Espérance, Leeuwin et Horn. Avec d'autres, Bernard Moitessier relève le défi et prend congé des siens dans le port de Plymouth. Seul entre mer et ciel, il relate dans son journal de bord ses dix mois sans toucher terre, sa vie au quotidien sur le Joshua, les dauphins, les poissons volants et les étoiles.
La longue route est un chant, un poème à la mer, une grande aventure dont nous sommes les témoins directs.
«À quel moment précis est-elle tombée de l'autre côté ? Du côté des gens qui deviennent tristement célèbres dans leur immeuble, leur quartier, parce que la photo de leur enfant a été imprimée sur un avis de recherche ?»Adèle n'a que seize ans lorsqu'elle disparaît. Marion, sa mère, prévient aussitôt la police. Malgré les recherches, elle reste introuvable. Entre l'adolescente et ses proches, les liens se sont distendus et le silence l'a emporté. Moins d'une semaine après sa disparition, un attentat perpétré par Daech au Forum des Halles tue vingt-cinq personnes. Et si Adèle faisait partie des victimes ?Dressant avec brio le portrait en creux d'une absente, l'auteure de Danser livre un roman émouvant qui nous tient en haleine de bout en bout.
« Il était alors impossible d'imaginer que trois jours plus tard, dans la nuit de jeudi à vendredi, Etienne tuerait sa femme. » Etienne est correcteur dans l'édition. Avec sa femme Vive, délicieusement fantasque, ils forment depuis dix ans un couple solide et amoureux. Parisiens éclairés qui vont de vernissage en concert classique, ils sont l'un pour l'autre ce que chacun cherchait depuis longtemps. Mais quelque chose va faire dérailler cette parfaite partition. Ce sera aussi infime que l'épaisseur d'un cheveu, aussi violent qu'un cyclone qui ravage tout sur son passage. Implacable trajectoire tragique, L'Épaisseur d'un cheveu ausculte notre part d'ombre. Claire Berest met en place un compte-à-rebours avec l'extrême précision qu'on lui connaît pour se livrer à la fascinante autopsie d'un homme en route vers la folie.Rentrée littéraire 2023 : Choix de L'Obs-France Culture Prix du jury - Le festival des Écrivains chez Gonzague Saint BrisSélection rentrée littéraire : Les 30 romans préférés des libraires Furet du Nord-Decitre
Dans le miroir de la salle de bains, elle se dévisage, et se voit telle que les amis d'Étienne vont la voir : une fille fade et gauche, une fille qu'il a choisie parce qu'elle ne risque pas de lui faire de l'ombre.
Un soir de canicule, en août à Paris, deux couples se rejoignent pour dîner. La soirée aura lieu chez Étienne. Claudia, sa compagne, d'une timidité maladive, a cuisiné toute la journée pour masquer son appréhension. Johar et Rémi, leurs invités, n'ont pas l'esprit tranquille non plus. Autour de la table, les uns nourrissent des intentions cachées tandis que les autres font tout pour garder leurs secrets. L'odeur épicée d'un curry, une veste qui glisse d'un fauteuil, il suffit d'un rien pour que tout bascule.
Avec ce huis-clos renversant, Cécile Tlili interroge la place des femmes dans la société et tisse, avec délicatesse, une ode à l'émancipation et à la liberté.
Par la puissance de la littérature, sous la plume de James Norman Hall et Charles Nordhoff, puis grâce à Hollywood, l'histoire de la Bounty est entrée dans la mémoire collective. L'escale d'un navire britannique à Tahiti au 18e siècle. Un capitaine dur et injuste. La mutinerie. L'ivresse de la liberté puis la nécessité de fuir et, en une forme de damnation, l'exil volontaire sur Pitcairn... Plus de deux siècles après les faits, le drame fascine toujours. Derrière Les Révoltés de la Bounty, il y a un homme discret, dont la vie hors du commun mérite d'être contée. Né dans l'Iowa, James Norman Hall a connu la Grande Guerre, la difficulté de se reconstruire, la dèche et l'errance puis, après des années de doutes et d'obstination, un immense succès littéraire qui ne l'a jamais détourné d'une vie simple à Tahiti, où il s'était installé. Après la tourmente entraîne le lecteur dans la vie et l'oeuvre de James Norman Hall ainsi que dans la Polynésie de l'entre-deux-guerres et d'aujourd'hui. Dans ce récit, qui investit parfois la fiction, l'auteur nous invite également à l'accompagner dans sa propre découverte de James Norman Hall.
«En quelques trimestres j'avais tourné casaque. Les Français m'évitaient, avertis par leurs parents des risques de mauvaise influence qu'ils couraient à me fréquenter. Pire, mes bulletins scolaires, ombre bien obscure, me qualifiaient de décadent et d'insolent. Devenu inapte à représenter ma classe, je laissai les professeurs m'achever lors du dernier conseil de l'année. On comparait mon apogée scolaire à la Renaissance ; un bon souvenir qui ne reviendrait jamais.» Placé à l'Aide sociale à l'enfance dès son plus jeune âge, Skander est un garçon curieux de tout, passionné par la lecture. Mais son destin bascule lorsqu'il atterrit à Courseine, en banlieue parisienne, chez la redoutable Madame Khadija. Au collège, il est entraîné malgré lui par les jeunes du Grand Quartier, qui abolissent sa boussole morale. La rue devient son royaume, et l'éloigne chaque jour davantage de ses rêves d'enfant... Avec Les conditions idéales, Mokhtar Amoudi signe un roman d'apprentissage au charme irrésistible.
Un dernier volume encore plus explosif que les précédents. Nelly Kaprièlian, Les Inrockuptibles.
Le constat est d'une âpreté inouïe, dans laquelle pourtant ne se dissout pas l'humanisme tenace et rageur qu'on sent pulser dans chaque page, chaque phrase. Nathalie Crom, Télérama.
La manière qu'a Despentes de dépeindre ses personnages et de les ancrer dans le réel captive. Emma Dubois, Les Échos.
Trois tomes addictifs et intelligents. Drôlerie, sens de la formule et collision des niveaux de langage se mêlent pour rendre Vernon irrésistible. Raphaëlle Leyris, Le Monde des livres.
L'une des fresques les plus marquantes de ce début de XXIe siècle. Marianne Pavot, L'Express.
«Trahir qui disparut, dans La disparition, ravirait au lisant subtil tout plaisir. Motus donc, sur l'inconnu noyau manquant - un rond pas tout à fait clos finissant par un trait horizontal - , blanc sillon damnatif où s'abîma un Anton Voyl, mais d'où surgit aussi la fiction. Disons, sans plus, qu'il a rapport à la vocalisation. L'aiguillon paraîtra à d'aucuns trop grammatical. Vain soupçon : contraint par son savant pari à moult combinaisons, allusions, substitutions ou circonclusions, jamais G.P. n'arracha au banal discours joyaux plus brillants ni si purs. Jamais plus fol alibi n'accoucha d'avatars si mirobolants. Oui, il fallait un grand art, un art hors du commun, pour fourbir tout un roman sans ça !»Bernard Pingaud.
J'ai repensé à ces innombrables rapports auxquels je m'étais forcée par politesse, pour ne pas froisser les ego fragiles. À toutes les fois où mon plaisir était optionnel, où je n'avais pas joui. À tous ces coïts où j'avais eu mal avant, pendant, après. Aux préparatifs douloureux à coups d'épilateur, aux pénétrations à rallonge, aux positions inconfortables, aux cystites du lendemain. À tous ces sacrifices pour rester cotée à l'argus sur le grand marché de la baisabilité. À toute cette mascarade destinée à attirer le chaland ou à maintenir le désir après des années de vie commune. Cette servitude volontaire à laquelle se soumettent les femmes hétérosexuelles, pour si peu de plaisir en retour, sans doute par peur d'être abandonnées, une fois fripées comme ces vieilles filles qu'on regarde avec pitié. Un jour, j'ai arrêté le sexe avec les hommes.
Autrice et documentariste spécialiste de l'intime et du rapport au corps, Ovidie retrace ici la trajectoire qui l'a conduite à quatre années de grève du sexe.
Dirigée par Vanessa Springora, la collection Fauteuse de trouble articule intimité et émancipation, érotisme et féminisme, corps et révolte, sexuel et textuel.
« Une femme, pour être en mesure d'écrire, doit avoir de l'argent et une chambre à elle ; et cela, comme vous allez le voir, ne résout en rien le grand problème de ce qu'est la vraie nature de la femme et la vraie nature de la littérature. »Virginia Woolf interroge dans cet essai incontournable toutes les constructions historiques, économiques et sociales qui, au fil des siècles, ont empêché les femmes d'écrire, de penser et de créer avec la même liberté que les hommes. Avec un regard volontairement impertinent et résolument moderne, elle mène une réflexion remarquable sur « les femmes et la littérature », et nous livre un texte féministe intemporel et nécessaire.Traduction et notes de Sophie Chiari.Préface de Lauren Bastide.
C'est un pavillon qui ressemble à tous ceux du lotissement. Ou presque. Chez eux, il y a quatre chambres. La sienne, celle de son petit frère Gilles, celle des parents, et celle des cadavres. Le père est chasseur de gros gibier. La mère est transparente, soumise aux humeurs de son mari. Le samedi se passe à jouer dans les carcasses de voitures de la décharge. Jusqu'au jour où un violent accident vient faire bégayer le présent.
Dès lors, Gilles ne rit plus. Elle, avec ses dix ans, voudrait revenir en arrière. Effacer cette vie qui lui apparaît comme le brouillon de l'autre. La vraie. Alors elle retrousse ses manches et plonge tête la première dans le cru de l'existence. Elle fait diversion, passe entre les coups, et conserve l'espoir fou que tout s'arrange un jour.La candeur des contes de notre enfance mêlée à la terreur des thrillers de Stephen King. Bernard Lehut, RTL.Le phénomène de la rentrée littéraire 2018. Nicolas Carreau, Europe 1.Un tour de magie. Amélie Nothomb.Prix Renaudot des lycéens, Grand Prix des lectrices de Elle (roman), Prix du roman Fnac, prix Filigranes, prix Victor-Rossel, Étoile du roman, Prix du premier roman (Québec), La Vraie Vie a été traduit dans une vingtaine de langues.
Avec Toute une moitié du monde, Alice Zeniter écrit un livre hautement stimulant, fondé sur ses expériences personnelles de lectrice avant tout, mais d'écrivaine aussi, un livre qui nous invite à repenser nos façons de lire les histoires qu'on nous raconte. C'est aux lecteurs que nous sommes qu'il s'adresse, c'est avec nous qu'il converse, avec autant de sérieux que d'allégresse, autant d'humour que d'érudition. Ce livre est tout simplement l'histoire d'une femme qui aimerait qu'on ouvre en grand les fenêtres de la fiction.
«Arrivé à une certaine hauteur dans la latitude ou la longitude de l'océan conjugal, il se déclare un petit mal chronique, intermittent, assez semblable à des rages de dent... Exemples : Caroline, votre ex-biche, votre ex-trésor, devenue tout bonnement votre femme, s'appuie beaucoup trop sur votre bras en se promenant sur le boulevard, ou, trouve beaucoup plus distingué de ne plus vous donner le bras...» Prendre les choses avec philosophie, pragmatisme, humour et empathie ? Peut-être la recette d'un mariage réussi ?
Cette oeuvre de jeunesse fut nommée ainsi en l'honneur de Saturne, planète des mélancoliques. Rêvant à une poésie «soluble dans l'air», Verlaine souhaite établir une correspondance entre sentiments et sensations. À travers cette recherche poétique, il explore une grande variété de thèmes, de la rêverie urbaine dans «Nocturne parisien» à l'événement historique dans «La Mort de Philippe II».Dans ce recueil, le poète se détache de ses inspirations parnassiennes et symbolistes. Le rythme de ses vers s'affranchit peu à peu de la norme esthétique de l'époque et laisse parler la musique.- Objet d'étude : La poésie du XIX? siècle au XXI? siècle- Dossier pédagogique : Cinq fiches pour saisir les enjeux de l'oeuvre- Prolongement : Le poète, un être à part (corpus de textes).
En 1874, lorsque Verlaine reprend à Felix Mendelssohn le titre de ses courtes pièces pour piano, Romances sans paroles, cette sorte de chanson entrée en littérature à l'époque romantique relève déjà d'une tradition désuète. Mais l'essentiel ici est qu'elle nous dise la primauté du chant dans une poésie à la fois naïve et savante dont le lyrisme mélancolique exprime de manière alors neuve ce que le poète lui-même appelait « le vrai vague » où fusionnent des sensations diverses. Et ce recueil à l'atmosphère noyée, il suffit que le sens simplement y murmure.
Romances sans paroles n'était pas encore publié quand Verlaine fut arrêté pour avoir tiré sur Rimbaud, et Cellulairement fut écrit pendant son séjour en prison. Les poèmes, pourtant, font peu de place à la vie carcérale, et retracent surtout une crise d'identité sans pareille dans la vie du poète. Désormais, Verlaine ne joue plus avec une réalité douloureuse : il la vit et cherche à fuir.
Edition d'Olivier Bivort.
" Nerval Aurélia Une dame que j'avais aimée longtemps et que j'appellerai du nom d'Aurélia, était perdue pour moi. Peu importent les circonstances de cet événement qui devait avoir une si grande influence sur ma vie. Chacun peut chercher dans ses souvenirs l'émotion la plus navrante, le coup le plus terrible frappé sur l'âme par le destin ; il faut alors se résoudre à mourir ou à vivre : - je dirai plus tard pourquoi je n'ai pas choisi la mort. " A la différence du narrateur, Nerval choisit la mort un jour de janvier 1855, laissant Aurélia inachevé. Le récit, qui ne dissocie pas le rêve et la vie mais au contraire les réunit - c'est son sous-titre -, affirme la quête de l'unité perdue par un Je qui raconte et commente tour à tour l'expérience qu'il entend dépasser dans une harmonie retrouvée.
Présentation et notes par Michel Brix.
Texte intégral. "
Verlaine Poèmes saturniens Des Poèmes saturniens, entendons qu'ils sont placés sous le signe de Saturne. Ils seront donc inspirés : il n'était pas inutile de l'affirmer alors que régnaient encore des versificateurs parnassiens. Ils seront aussi baignés d'une rêverie douce et savante, tandis que le poète tournera son regard vers l'intérieur. Point ou peu de récits ou d'anecdotes. Ici l'on se souvient, l'espace d'un sonnet - et non d'un interminable poème -, sur un air de chanson grise. Et il n'est pas jusqu'à celle que l'on aime, qui ne prenne une forme incertaine.
Tout semble simple. Tout est savant, mais d'une technique si maîtrisée qu'elle a cessé d'être visible, au point que beaucoup s'y sont trompés. Verlaine est un poète à la fois immédiat et difficile. Il exige donc une annotation riche et précise (combien de parodies qui avaient échappé jusqu'à cette édition à l'attention des lecteurs ?), une attention à la langue et à la prosodie, alors, mais alors seulement, comme l'avait dit à peu près Ovide :
« Maintenant, va, mon Livre, où le hasard te mène ! » édition critique établie, annotée et préfacée par Martine Bercot.
De sa mission d'inspection des monuments historiques en Corse, Mérimée rapporta de précieuses notes de voyage. Mais l'archéologue avouait son impuissance à exprimer le mystère de l'âme corse. Au romancier de prendre le relais : mieux que le traité savant dont elle tirait sa substance, la fiction savait recréer une Corse éternelle dans toute sa vérité, évitant avec ironie les lieux communs trop abondants d'une couleur locale à l'usage des touristes. Sous le regard de bandits, de bergers et d'une belle Irlandaise, Orso, en héros tragique, est déchiré entre le respect de la justice et la nécessité de la vendetta, soumis aux forces archaïques que déchaîne, telle une moderne Electre, sa soeur, la belle Colomba, jeteuse de sorts et voceratrice sublime.
Introduction et notes de Jean Balsamo.
Texte intégral
«Le sujet de Nana est celui-ci:Toute une société se ruant sur le cul. Une meute derrière une chienne, qui n'est pas en chaleur et qui se moque des chiens qui la suivent. Le poème des désirs du mâle, le grand levier qui remue le monde.»(Émile Zola).«J'ai passé hier toute la journée jusqu'à 11 heures et demie du soir à lire Nana, je n'en ai pas dormi cette nuit... Les caractères sont merveilleux de vérité... La mort de Nana est michelangelesque! Un livre énorme, mon bon!»(Gustave Flaubert).Dans ce roman, et dans ce personnage de courtisane, Zola a peint à la fois la corruption d'une femme, de la société où elle recrute ses amants, et d'un régime politique, le Second Empire, qui se rue avec insouciance vers la guerre et la débâcle. Sexualité, histoire et mythe vivent et meurent ensemble, dans un même souffle brutal.
Un livre unique, une somme romanesque, un livre dicté en moins de deux mois et qui est le sommet de l'improvisation, un récit sur Bonaparte, Waterloo, l'Italie, un grand ouvrage politique, que dire encore en faveur de ce qu'Italo Calvino appelait «le plus beau roman du monde». Une comédie humaine, un itinéraire spirituel, plusieurs histoires d'amour enfermées dans une petite ville d'Italie, avec le passage du temps, le charme de la mémoire, les «paysages sublimes», le paradoxe d'un héros qui trouve son paradis en prison, toutes les vertus et toutes les lâchetés, il faudrait tout citer. Manqueraient encore la merveilleuse brièveté de la phrase, et le sens de l'humour. Toute la littérature française en un volume.
Les Trois Contes résument tout l'art flaubertien:Dans Un coeur simple, c'est le psychologue intimiste qui travaille à dévoiler la grandeur d'une vie minuscule; dans La Légende de saint Julien l'Hospitalier, l'amateur de fables se laisse emporter par le surnaturel; dans Hérodias enfin, l'historien se fait aussi peintre pour restituer la rencontre du christianisme et du judaïsme dans toute sa flamboyance. Tour à tour, l'enfance normande de l'auteur, le Moyen Âge et l'Antiquité fournissent le décor à une quête des origines dont la beauté de la prose est sans égal. Et derrière tant d'art se révèle la tendresse de qui a écrit:«Je veux apitoyer, faire pleurer les âmes sensibles, en étant une moi-même.»